FLORILÈGE DES 5e 1, 2008

coquillage


Cette page est destinée à recevoir, pour les partager, les poèmes choisis par les élèves, sur le thème de la mer.


Hannah a choisi le poème de Baudelaire, "L'homme et la mer" (extrait des Fleurs du mal, 1857) : "j'ai choisi cette poésie car quand on la lit avec attention, on peut tout comprendre ! Je crois avoir bien compris.",  et lui a donné cette belle illustration :


Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n'est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
Tu l'embrasses des yeux et des bras, et ton coeur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
Homme, nul n'a sondé le fond de tes abîmes ;
Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !

Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remord,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables !






Hannah, illustration de Baudelaire

Hannah, illustration de "L'homme et la mer", février 2008
Guy a choisi un poème de Paul Verlaine, "La mer est plus belle" (extrait de Sagesse, III, 15, 1881), parce que "j'aime les rimes car il y en a presque toujours et j'aime les vers qui sont courts."  et pour l'illustrer la photographie ci-contre.

La mer est plus belle

La mer est plus belle
Que les cathédrales,
Nourrice fidèle,
Berceuse de râles,
La mer sur qui prie
La Vierge Marie !

Elle a tous les dons
Terribles et doux.
J'entends ses pardons
Gronder ses courroux ...
Cette immensité
N'a rien d'entêté.

Oh ! si patiente,
Même quand méchante !
Un souffle ami hante
La vague, et nous chante :
" Vous sans espérance,
Mourez sans souffrance ! "

Et puis sous les cieux
Qui s'y rient plus clairs,
Elle a des airs bleus,
Roses, gris et verts...
Plus belle que tous,
Meilleure que nous !
Guy

Maya a découvert sur le site de David Myriam, ce poème qu'elle a beaucoup aimé  et pour lequel elle n'a pas désiré d'illustration :  " je l'ai choisi car je le trouve intéressant par ce qu'il dit de la mer, les qualités et défauts, son point de vue sur elle. David Myriam aussi parle de l'évolution de la mer, comment les vagues se cassent, comment est le sable, oú la vague s'écoule,... . Je l'aime bien aussi car quand je le lis, il me fait du bien, c'est joli, les phrases (les constructions de phrases avec des mots différents et des fois des mots qu'on connaît".

Poème court sur les vagues contre les digues intérieures

 Une vague amoureuse s’écrase à l’infini
elle arrache le sable pour le poser un peu plus loin
la force s’enlise sur la plage entre les trous et les dunes
elle crache son écume et s’étale en gargouillis
l’eau molle reflue sans bruit au large de nos vies
La vague ronge une côte ou deux, mais n’atteint pas le désert intérieur,
ce cœur sec miné de bunkers lentement avalés par les grains de pierre,
cet empilement de peur refroidi par des tours d’ivoire
Les murs armés sans cesse rehaussés de faux espoirs
s’enlisent sur leurs fondations mouvantes,
l’eau volatile se disloque et se noie dans les fosses,
commune perdition dans les tourbillons de masse
La vague, versatile, repart... et revient,
elle attend une faille, une écluse,
pour s’écouler entre nos mains
et irriguer les vies recluses
figées derrière les digues de glace.
Nina a choisi "Oceano nox" de Victor Hugo (Les Rayons et les ombres, 1840) et, pour l'illustrer, la photo ci-contre, qui l'accompagnait sur le site des poésies.
"J'aime ce poème car j'adore les poèmes de Victor Hugo. Ce poème me fait penser à mon grand-père."

Oceano nox

Oh ! combien de marins, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines,
Dans ce morne horizon se sont évanouis !
Combien ont disparu, dure et triste fortune !
Dans une mer sans fond, par une nuit sans lune,
Sous l'aveugle océan à jamais enfouis !

Combien de patrons morts avec leurs équipages !
L'ouragan de leur vie a pris toutes les pages
Et d'un souffle il a tout dispersé sur les flots !
Nul ne saura leur fin dans l'abîme plongée.
Chaque vague en passant d'un butin s'est chargée ;
L'une a saisi l'esquif, l'autre les matelots !

Nul ne sait votre sort, pauvres têtes perdues !
Vous roulez à travers les sombres étendues,
Heurtant de vos fronts morts des écueils inconnus.
Oh ! que de vieux parents, qui n'avaient plus qu'un rêve,
Sont morts en attendant tous les jours sur la grève
Ceux qui ne sont pas revenus !

On s'entretient de vous parfois dans les veillées.
Maint joyeux cercle, assis sur des ancres rouillées,
Mêle encor quelque temps vos noms d'ombre couverts
Aux rires, aux refrains, aux récits d'aventures,
Aux baisers qu'on dérobe à vos belles futures,
Tandis que vous dormez dans les goémons verts !

On demande : - Où sont-ils ? sont-ils rois dans quelque île ?
Nous ont-ils délaissés pour un bord plus fertile ? -
Puis votre souvenir même est enseveli.
Le corps se perd dans l'eau, le nom dans la mémoire.
Le temps, qui sur toute ombre en verse une plus noire,
Sur le sombre océan jette le sombre oubli.

Bientôt des yeux de tous votre ombre est disparue.
L'un n'a-t-il pas sa barque et l'autre sa charrue ?
Seules, durant ces nuits où l'orage est vainqueur,
Vos veuves aux fronts blancs, lasses de vous attendre,
Parlent encor de vous en remuant la cendre
De leur foyer et de leur coeur !

Et quand la tombe enfin a fermé leur paupière,
Rien ne sait plus vos noms, pas même une humble pierre
Dans l'étroit cimetière où l'écho nous répond,
Pas même un saule vert qui s'effeuille à l'automne,
Pas même la chanson naïve et monotone
Que chante un mendiant à l'angle d'un vieux pont !

Où sont-ils, les marins sombrés dans les nuits noires ?
O flots, que vous savez de lugubres histoires !
Flots profonds redoutés des mères à genoux !
Vous vous les racontez en montant les marées,
Et c'est ce qui vous fait ces voix désespérées
Que vous avez le soir quand vous venez vers nous!







choix de Nina

Agathe J. a choisi un poème des Antiquité de Rome de Joachim Du Bellay.

Comme l'on voit de loin sur la mer courroucée
Une montagne d'eau d'un grand branle ondoyant,
Puis traînant mille flots, d'un gros choc aboyant
Se crever contre un roc, où le vent l'a poussée :

Comme on voit la fureur par l'Aquilon chassée
D'un sifflement aigu l'orage tournoyant,
Puis d'une aile plus large en l'air s'esbanoyant
Arrêter tout à coup sa carrière lassée :

Et comme on voit la flamme ondoyant en cent lieux
Se rassemblant en un, s'aiguiser vers les cieux,
Puis tomber languissante : ainsi parmi le monde

Erra la monarchie : et croissant tout ainsi
Qu'un flot, qu'un vent, qu'un feu, sa course vagabonde
Par un arrêt fatal s'est venue perdre ici.
Naomi a choisi un sonnet de Siméon-Guillaume de La Roque (1551 - 1611) et a peint une belle aquarelle pour l'illustrer.

Je me vais comparant à la mer vagabonde
Où vont toutes les eaux de ce grand univers,
Parce que mes ennuis et mes soucis divers
Descendent de mon coeur d'une fuite seconde.

La mer pour le tribut qui de son sein baonde
Ne surpasse jamais ses hauts bords découverts,
Et pour extrême flux de mes tourments soufferts,
Mon coeur ne peut sortir des limites du monde.

Si les vents par la mer font émouvoir les flots,
Mon coeur est agité de mes cruels sanglots.
L'un est sujet d'Amour, et l'autre de Neptune,

Ils s'arrosent tous deux d'une amère liqueur,
Il est vrai que la mer parfois est sans fortune,
Mais las ! je sens toujours la tempête en mon coeur.
Naomi, 2008

Naomi, illustration de "Je me vais comparant..." (aquarelle), 2008


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